J'adore les romans de Guillaume Musso. Si, si c'est vrai. Bon, pas d'un point de vue littéraire en revanche, c'est vrai. Mais d'un point de vue de bloggeuse, je les adore. Ils me donnent toujours plein d'idées d'articles remplis d'ironie et, en l'occurrence, dénonciateur interrogateur. Pour l'anecdote, le synopsis revu et corrigé de Demain est l'article le plus consulté de ce blog. Oui, madame.
On est d'accord que, lorsqu'on décrit les romans de Guillaume Musso, le terme de page-turner est l'un des mots qui revient le plus souvent ? Pour les moins anglophiles d'entre nous, définition !
« Page-turner. Se dit d'un livre qui est tellement excitant qu'on souhaite le lire rapidement. »Définition traduite depuis dictionary.cambridge.org
Soit. Qu'est-ce qu'un livre excitant ? Selon ma propre vision, c'est un scénario bien construit, des personnages à la psychologie approfondie, un style soigné sans être lourd, le tout débouchant sur une lecture fluide et agréable. Autant dire que si un auteur remplit toutes ces cases, il devient l'équivalent d'un demi-dieu à mes yeux. Du coup, si je m'en tiens à la stricte définition, si on me parle de page-turner, je devrais m'attendre à retrouver tous ces ingrédients pendant ma lecture.
Vous vous doutez bien qu'il y a un mais. Parce qu'une fois de plus, j'ai le sentiment qu'on m'arnaque.
Pendant ma lecture de L'instant Présent, je me suis posée une question à priori toute simple. Si la seule raison pour laquelle on tourne rapidement les pages de ces bouquins soit disant exceptionnels, c'est parce que ces dites pages sont... vides ? Procédons à un petit exercice.
SORTEZ VOS CALCULETTES ET OUVREZ VOTRE LIVRE À LA PAGE...
Voici la retranscription d'une page du roman de Guillaume Musso précédemment cité en version poche.
Pour les besoins de la démonstrations, je vous annonce que cet extrait compte 186 mots.
Comparons maintenant cet extrait à d'autres romans. Sans beaucoup de surprise, j'ai choisi une page d'Harry Potter à l'école des sorciers. D'une part, parce que l'exemple parle à un maximum de personnes. Tout le monde ou presque c'est ce que représente une page d'Harry Potter et combien de temps il met à la lire. D'autre part parce que HP, et son tome 1 notamment, est considéré comme de la littérature jeunesse (c'est marqué "À partir de 10 ans" sur la quatrième) et est donc réputé comme écrit plus simplement pour une lecture facile. Voici l'extrait :
Ça se voit à l'oeil mais pour l'exactitude, l'extrait compte 306 mots.
Dernière comparaison avec une page d'un roman de littérature adulte. J'ai choisi un extrait du livre Les Piliers de la Terre de Ken Follett, connu pour son caractère particulièrement dense.
La page fait 402 mots, soit plus de deux fois le nombre de mots contenus dans une page de L'Instant Présent de Guillaume Musso. Vous voyez où je veux en venir. La raison pour laquelle on lit plus vite un livre réputé "page-turner" n'a rien a rien a voir avec sa qualité ou son intrigue halentante. Elle tient simplement au fait que ces pages sont plus courtes. CQFD.
IL N'Y A PAS QUE LA TAILLE QUI COMPTE
Vous commencez à me connaître (je l'espère du moins), je ne suis pas venue vous présenter une démonstration mono-argumentée. Les chiffres sont pratiques pour marquer des points mais ils n'expliquent pas toujours tout. Mais j'ai d'autres atouts dans ma manche. Enfin au moins un.
Parlons du fond plutôt que de la forme.
La majorité du contenu de L'Instant Présent est la répétition d'un même schéma. Tous les débuts et fins de chapitre, le personnage fait plus ou moins les mêmes choses et cherche surtout les mêmes choses. Au final, il n'y a qu'une partie de chaque chapitre qui est véritablement "inédite". À part si on est féru de descriptifs d'itinéraires new-yorkais, ou si on tient absolument à ne manquer aucun détail de la douche que prend le personnage principal ou de ce qu'il porte (même si ça n'a rien d'exceptionnel), il y a pas mal de lignes qui, naturellement, se survolent plutôt qu'elles se lisent.
Dans ce schéma narratif qui tourne en boucle, évoluent tout au plus 3 personnages. Il y en a bien quelques autres mais ce sont les seuls dont on s'intéresse à l'histoire et dont on suit la destinée jusqu'au bout. Trois personnages... Ce n'est vraiment pas lourd. Cherchez-en d'autres qui ne s'articulent qu'autour de trois personnages, je n'en connais personnellement pas des masses.
Je ne dis pas forcément qu'un scénario en boucle et un panel de personnages dépouillé débouchent nécessairement sur un bouquin de moindre qualité. Ça me semble simplement logique qu'un développement très simplifié entraine une lecture rapide.
EN CONCLUSION
Page avec 2 fois moins de mots qu'à l'accoutumée + Intrigue répétitive = Page-Turner.
Équation démontrée par le théorème de Lily. Ça me donnerait presque envie de retourner en cours de maths. Presque j'ai dit.
J'attends évidemment vos réactions en commentaires, où j'espère poursuivre la discussion avec vous ;-).
J'attends évidemment vos réactions en commentaires, où j'espère poursuivre la discussion avec vous ;-).
xoxo
Lily
Lily
Hourra, voilà donc le secret pour écrire un livre qui sera un grand succès XD Et cerise sur le gâteau : ça devrait demander moins de travail que d'essayer de rivaliser avec Ken Follett...
RépondreSupprimerC’est à se demander pourquoi on s’enquiquine autant… ;-)
SupprimerDémonstration inattaquable! :) Il y quelques années, j'avais lu des Marc Levy, la curiosité m'avit poussée à comprendre ce qui fascinait tout le monde. Cela m'avait semblé tellement fade, que je voyais les histoires en teintes de gris, en noir et blanc (en comparaison avec des bouquins qui te mettent mille couleurs et images en tête)...
RépondreSupprimerJulia
Effectivement, Levy ou Musso c’est un peu le même combat… Analogie intéressante que celle des couleurs. Ça m’a toujours fait penser à un rouage mécanique = on met les pièces dans le système et c’est toujours le même objet qui ressort.
SupprimerBelle démonstration! Je n'y avais jamais pensée...après je ne suis pas une grosse lectrice de ce genre de livres
RépondreSupprimerComme tu le vois, tu ne manques pas grand chose… ;-)
Supprimerdans la famille page-urner vous avez demandé le petit Musso .. Pour moi il maitrise la technique comme le montre cette démonstration limpide et mathématique.
RépondreSupprimerOui mais voilà quand je lis, j'accepte la technique page-turner si elle ne se limité pas à une technique sans émotion, et pour Musso .. c'est le cas.
Un article qui a vraiment du sens
Oui l’objet de cet article était surtout de comprendre la mécanique du page-turner, plus que de s’arrêter sur le contenu même du livre.
SupprimerHaha je pensais bien qu'il y avait un truc dans ce goût là, sans avoir vraiment chercher !
RépondreSupprimerOui c’est exactement ça. Je savais bien que c’était écrit « gros » dans ce genre de bouquin mais je n’avais jamais poussé la réflexion et la comparaison jusqu’au bout. C’est maintenant chose faite ^^
SupprimerC'est pas faux. Et pas bête la théorie. Je vois pour le dernier page turner que j'ai lu (Purgatoire des innocents de Giebel) : peu de description en peu de mot, de l'action à l'instant T. Oui je comprends maintenant pourquoi ça a filé à cette vitesse.
RépondreSupprimerLe titre du bouquin me dit vaguement quelque chose… C’était bien quand même ?
SupprimerJe viens de tomber sur ton blog et j'aime beaucoup tes réflexions lectures. C'est que ça change du contenu qu'on retrouve sur la plupart des blogs littéraires !
RépondreSupprimerJ'aime bien ton analyse des Page-Turner, personnellement ce n'est pas le type de livre qui m'attire. Comme le dit Julia, c'est plutôt fade (pour moi en tout cas). Quitte à m'investir dans une histoire, je préfère encore en lire une qui prend son temps pour bien développer son intrigue, ses personnages, et qui n'hésite pas à sortir des sentiers battus.
Merci c’est gentil ! Et c'est encore plus gentil d’avoir pris le temps de lire et de commenter ;-).
SupprimerJe suis évidemment assez d’accord avec toi. Ma préférence va le plus souvent aux histoires qui prennent le temps du détail et de la construction. Le page-turner est (en général) souvent proche du copier/coller par rapport à ses petits camarades du même genre.